Le mensuel pratique et technique
du kinésithérapeute

La kinésithérapie : une rencontre entre deux personnes

Aude Quesnot
Kinésithér Scient 2022,0648:01 - 10/12/2022

La pratique de notre profession repose sur un trépied complexe dont les fondements sont l’evidence-based practice, l’information du patient, qui inclut l’éducation thérapeutique et le choix concerté des deux protagonistes, le professionnel de santé et le soigné.

La santé a été définie, par l’OMS, comme l’état de bien-être physique, psychique et social. Cette définition a le mérite de rappeler que la notion de santé ne s’applique pas au seul physique, mais que le mental et le relationnel interviennent de manière prégnante dans la définition de la santé.

L’evidence-based practice nous permet d’affirmer que notre profession devient scientifique, que nos décisions sont éclairées aux vues des résultats d’études randomisées.

L’information du patient et l’éducation thérapeutique rentrent également dans une démarche raisonnée, organisée, tracée dans le dossier du patient et qui a pour objectif de permettre au patient de comprendre les tenants et les aboutissants de la prise en charge de manière éclairée et en tenant compte de la culture de chaque individu.

Si grâce à ces deux piliers des métiers de la santé, de réels progrès ont vu le jour et si certaines techniques empiriques ont pu être évitées, nous constatons cependant un mal-être chez les professionnels et chez certains patients.

Les patients aspirent à une écoute et à une prise en charge individualisée. Ils attendent le soulagement de leurs symptômes, la prise en charge de leur pathologie mais aussi de leurs appréhensions, de leurs doutes et de leurs peurs. Face à une prise en charge pragmatique et efficace, les ressentis et les non-dits ne sont pas exprimés. 4 patients sur 10 compensent cette « béance » de la médecine contemporaine par une orientation vers des techniques alternatives délivrées par des magnétiseurs, des psychothérapeutes, des kinésiologues par exemple (miviludes.gouv.fr).

Les professionnels de santé sont pris en étau, et ce phénomène s’est vivement accentué depuis 2020, entre les contraintes médico-économiques, une politique de santé évoluant vers l’ambulatoire et des patients qui peuvent être de plus en plus lourds à prendre en charge. Je citerai deux situations :

– Mme P., 58 ans, qui s’est fait opérer en ambulatoire de deux prothèses de genou unicompartimentales simultanément et qui doit être prise en charge dès le lendemain. Les questions sont nombreuses, la douleur est présente et la patiente a simultanément besoin d’être rassurée et guidée en plus des séances classiques ;

– M. C., 86 ans, doit être pris en charge à son domicile après une chute ayant provoqué plaies et ecchymoses dans un contexte de troubles de l’équilibre, de sarcopénie, de dénutrition, d'aménagement du lieu de vie, alors que le kinésithérapeute ne peut intervenir que dans 5 jours.

Malheureusement, le temps consacré à chaque patient nous manque et nous le vivons mal. Les professionnels de santé souhaitent garder le meilleur parti des progrès scientifiques alliant la sécurité et la technicité des prises en charge en redonnant toute la valeur de la relation humaine au cours de la rencontre entre deux personnes, le soigné et le soignant.

Retrouvons du temps philosophique avec les patients que nous prenons en charge.

Belles fêtes de fin d’année.

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