Le mensuel pratique et technique
du kinésithérapeute

Rééducation et fluctuations de l'état du patient dans la journée dans la maladie de Parkinson

Jean-Pierre Bleton
Kinésithér Scient 2013,539:37-38 - 10/01/2013

Les fluctuations de la symptomatologie clinique des patients atteints de maladie de Parkinson (MP) au cours de la journées sont appelées phénomènes « off-on ». Elles sont présentes chez environ 40 % des patients, 6 ans après la prise de lévodopa, et sur près de 4 sur 5 d’entre eux après 10 années d’évolution.

La période « off » est marquée par la réapparition des signes parkinsoniens. L’akinésie s’accentue et le potentiel moteur diminue de manière importante. La présentation la plus fréquente est l’akinésie de fin de dose. Elle se manifeste en fin d’efficacité de la prise de lévodopa et avant l’action de la prise suivante. Certaines périodes « off » apparaissent toujours à la même heure de la journée, le plus souvent en début de l’après-midi. Une autre présentation se manifeste par la présence de mouvements anormaux et de dyskinésies (fig. 1 et 2). Ils sont des effets secondaires des traitements de lévodopa au long cours.

Figures 1 et 2
Dyskinésies sévères constituées de mouvements anormaux complexes

Les blocages paradoxaux de début de dose sont plus rares. Ils apparaissent dans les minutes qui suivent la prise de lévodopa. Plus de la moitié des périodes « off » ont un caractère douloureux ou désagréable comme le syndrome des jambes sans repos, les akathisies, les crampes.

Les fluctuations ne sont pas uniquement motrices ; les patients atteints de MP présentent également des troubles non moteurs qui altèrent leur qualité de vie comme celles de leurs proches. Les principales fluctuations non motrices rencontrées affectent le sommeil, sont d’ordre cognitif, de l’humeur, occasionnent des douleurs, des troubles sensitifs subjectifs ainsi que des dysfonctions urinaires ou fécales.

Même si nombre de ces manifestations sont peu dopa-sensibles et ne répondent que partiellement aux traitements non-dopaminergiques, elles fluctuent en parallèle avec les troubles moteurs en fonction du taux plasmatique de lévodopa.

Présentes à la période de MP installée, les fluctuations non motrices se poursuivent à la période évoluée de la maladie.

Les patients présentant des fluctuations motrices présentent un grand risque de présenter également des fluctuations non motrices. Elles sont diverses, propres à chaque patient, apparaissent essentiellement au cours de la période « off » de moindre efficacité médicamenteuse, d’autres plus rares au cours de la période « on ».

Citons sans vouloir être exhaustif parmi les principaux symptômes survenant au cours de la période « off » : syndrome confusionnel, hallucinations, difficultés de concentration, difficulté à trouver ses mots, troubles mnésiques, comportements obsessionnels ou compulsifs, état dépressif, fatigue ou apathie, irritabilité ou impatience, tendance à s’isoler, insomnie (qui peut apparaître également à la période « on »), attaques brutales de sommeil, mais également des fourmillements, des paresthésies, des akathisies, ainsi que de l’hypotension, des œdèmes, du bavage, un flou ou une vision double, une perte du sens du goût, de la constipation, des dysphagies, des difficultés à respirer, des envies fréquentes d’uriner et des mictions impérieuses.

Elles peuvent être classées en trois catégories qui sont par ordre de fréquence : cognitivo-psychiques, dysautonomiques et sentivo-douloureuses [1].

Ces fluctuations non motrices sont sous-estimées, sous-diagnostiquées et souvent non traitées. Leur prévalence est différente d’un auteur à l’autre de 17 à 47 % [2]. Ces manifestations conduisent à se demander à quel moment de la journée pratiquer la rééducation : en période « off » ou en période « on ».

Lorsque le patient est au mieux de ses performances ou lorsqu’il est bloqué ? Il apparaît que les programmes de rééducation à visée de renforcement musculaire, d’entretien des fonctions aérobies par des programmes gymniques adaptés gagnent à être pratiqués au moment où le patient est dans les meilleures conditions physiques.

En revanche, les activités fonctionnelles comme l’apprentissage des transferts, l’entraînement à la marche, la maîtrise du freezing ont plus d’intérêt à être pratiqués au cours des périodes de moindre efficacité du traitement (période « off »). Certains patients arrivent par la marche ou l’activation forcée au moyen de mouvements volontaires à surmonter l’akinésie du « off ».

L’exercice n’est néanmoins pas raisonnablement envisageable chez ceux pour lesquels les périodes « off » sont très invalidantes. Certains sont si bloqués et dans une telle situation d’inconfort qu’ils ne sont pas en état de s’impliquer dans une activité demandant des efforts physiques ou de l’attention. En revanche, ils sont souvent soulagés par des techniques de relâchement musculaire, des mobilisations douces, et le retour d’une respiration calme et profonde.

BIBLIOGRAPHIE

[1] Seki M, Takahashi Ket al. Clinical features and varieties of non-motor fluctuations in Parkinson’s disease: A Japanese multicenter study.Parkinsonism and Related Disorders2012:1-5.
[2] Witjas T, Kaphan E, Azulay JP. Les fluctuations non motrices de la maladie de Parkinson.Rev Neurol2007;163:8-9, 846-50.

© J.-P. Bleton

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