Kinésithérapie et philosophie médicale : pour une meilleure approche du soin
Christophe Dauzac
Kinésithér Scient 2025,0677:01 - 10/07/2025
Quand on est contraint de développer des stratégies d'adaptation (modification du rythme de vie, anticipation de la douleur, évitement de certaines activités), on n’est plus dans la véritable santé.
Il y a près de soixante ans, le philosophe Georges Canguilhem(1) bouleversait la compréhension de la maladie en affirmant que le pathologique n'était pas un simple écart quantitatif par rapport à une norme, mais constituait « une autre norme de vie ». L'endométriose, cette maladie inflammatoire chronique qui concerne, en France, plus de 2 millions de femmes en âge de procréer, déstabilise d'emblée le regard médical. Comment comprendre qu'une femme puisse souffrir de douleurs invalidantes alors que ses examens révèlent des lésions minimes, tandis qu'une autre, porteuse de lésions importantes, demeure asymptomatique ?
Être attentif à la singularité
Chaque organisme établit donc ses propres normes de fonctionnement. L'expérience subjective d’une patiente doit être reconnue car elle est un élément primordial à intégrer au moment du diagnostic et des traitements. L’errance médicale pouvait durer 7 ans ! Il y a des raisons d’être optimiste car désormais, les politiques publiques se sont emparés de la prise en charge de cette pathologie. La stratégie nationale de santé de lutte contre l'endométriose (2022-2025), prévoit une amélioration de l'offre de soins par des filières spécialisées régionales, et l'accroissement des connaissances auprès des professionnels et du grand public.
Les recommandations dans leur ensemble insistent particulièrement sur la nécessité d’une approche globale, pluriprofessionnelle (médecin généraliste, gynécologue-obstétricien, sage-femme, kinésithérapeute...). Cependant, certaines prises en charge ne sont pas remboursées et peu de patientes bénéficient d’une prise en charge en affection de longue durée.
La kinésithérapie tient une place de choix dans le parcours de soins, tout à la fois thérapeutique et pédagogue, elle œuvre pour soulager et autoriser le corps des patientes à reprendre une activité physique et pour encourager leur motivation, notamment dans les périodes plus difficiles de la maladie.
Les patientes attendent de l’efficacité. La kinésithérapie ne peut qu’être singulière et se doit d’être attentive à l’expérience vécue. Comme toujours.
Bon été à tous.
(1) Canguilhem G. Le normal et le pathologie. Presses Universitaires de France, 1966.