Le mensuel pratique et technique
du kinésithérapeute

Thérapie manuelle du rachis (3e partie)

Jacques Vaillant
Kinésithér Scient 2013,540:41-42 - 10/02/2013

Nous continuons dans ce numéro le compte-rendu du numéro spécial du Journal of Electromyography & Kinesiology, consacré aux manipulations vertébrales et à la thérapie manuelle du rachis.

Effets mesurés de thérapies manuelles du rachis

Partant du constat que la lombalgie est un problème bien connu de la Santé publique, qui pourtant ne bénéficie pas d’une approche de traitement médical claire et faisant référence, Goertz et al. [6] ont choisi d’étudier dans la littérature un type particulier de manipulation vertébrale (MV).

De nombreux essais cliniques ont été menés pour évaluer l'effet ou l'efficacité de MV pour la lombalgie. L'objectif principal de cette étude était de décrire la littérature actuelle sur les résultats axés sur le patient à la suite d'un type particulier de MV couramment utilisée, chez les patients souffrant de lombalgie : les MV de grande vitesse et de faible amplitude (High-velocity low-amplitude - HVLA).

Une stratégie de recherche systématique dans la littérature a été utilisée pour détecter tous les essais cliniques portant sur les lombalgies traitées par HVLA et utilisant des critères prédéfinis par les auteurs. Ces critères étaient centrés sur le patient : échelle visuelle analogique, échelle d'évaluation numérique douleur, questionnaire de Roland-Morris, et l'Oswestry disability index low back pain.

Sur les 1 294 articles identifiés par cette recherche, 38 répondaient aux critères d'admissibilité. Comme dans les revues de littératures antérieurement réalisées sur ce thème, cette étude montre un faible effet du traitement, mais cet effet est constant, au moins aussi important que celui observé dans d'autres méthodes conservatrices de soins. Il est difficile de tirer des conclusions définitives du fait de l’hétérogénéité et l'incohérence des résultats des études sélectionnées.

De futures études sur le MV dans la lombalgie sont encore nécessaires. Les auteurs soulignent l’importance de déterminer par avance des méthodologies scientifiques de bonne qualité, afin de pouvoir exploiter les résultats obtenus.

Modifications électro-myographiques après manipulation

La diminution d'un tonus musculaire élevé est un des effets, souvent cité, de la manipulation vertébrale. La manipulation vertébrale est théorisée pour interférer sur un supposé cycle douleur-spasme-douleur que ceux qui souffrent de lombalgies peuvent expérimenter.

Lehman [7] constate que les travaux de recherche ont surtout étudié l'influence à court terme d’une seule manipulation vertébrale sur l'activité musculaire paravertébrale, soit au repos (debout ou couché, par exemple) ou lors de mouvements simples (par exemple flexion en avant).

Les travaux de bonne qualité méthodologique effectués jusqu’à ce jour ont généralement rapporté deux types de réductions de l'activité musculaire : couché sur le ventre ou pendant la position de flexion complète du tronc. La seule étude mesurant l'influence à long terme de la manipulation vertébrale n'a pas réussi à documenter un changement dans l'activité musculaire telle que mesurée par électromyographie de surface.

Les manipulations manuelles délivrées et les manipulations réalisées via un dispositif mécanique adapté ont toutes été associées à des changements dans l'activité des muscles. Les changements dans l'activité musculaire des muscles à distance des articulations vertébrales manipulées (par exemple les muscles des membres supérieurs) ont été documentés à la suite d'une seule manipulation vertébrale. Dans ce cas, plutôt que la réduction typique de l'activité musculaire, une augmentation de l'activation de repos a été rapportée. L'état de la dysfonction musculaire (par exemple « tension palpable » ou « muscle subjectivement tendu ») peut être un facteur dans la détermination d'une réponse myoélectrique à la manipulation vertébrale. À l'heure actuelle, la signification clinique du changement à court terme de l’amplitude électromyographique, suite à la MV, est inconnue.

Critères de suivi des patients

Complétant ce travail de mise au point, l’article de Passmore et Descarreaux [8] donne un aperçu général des mesures de performance (basées sur les résultats) utilisés dans le but d’évaluer objectivement les conséquences de la manipulation vertébrale. Bien que n'étant pas une revue de littérature systématique ou exhaustive, elle permet de classer et donner un aperçu historique, des aspects positifs et négatifs des techniques de mesure utilisées.

Les mesures de résultats sont tirés de l'ensemble des approches de la recherche et sont ventilés dans les sections suivantes : (1) les mesures du rendement biomécanique de la performance motrice, (2) les mesures de performance neurologique et (3) les mesures de la perception, de la perception motrice, et tâche complexe.

Le document se termine par quelques directions de recherche futures afin d'améliorer la compréhension de l'impact de la manipulation vertébrale, et la façon de mesurer objectivement les effets mécaniques et physiologiques sur le corps humain.

Suite dans notre prochain numéro

BIBLIOGRAPHIE

[6] Goertz CM, Pohlman KA, Vining RD, Brantingham JW, Long CR. Patient-centered outcomes of high-velocity, low amplitude spinal manipulation for low back pain: A systematic review. Journal of Electromyography & Kinesiology 2012 Oct;22(5):670-91.
[7] Lehman G. Kinesiological research: The use of surface electromyography for assessing the effects of spinal manipulation. Journal of Electromyography & Kinesiology 2012 Oct;22(5): 692-6.
[8] Passmore SR, Descarreaux M. Performance based objective outcomes measures and spinal manipulation. Journal of Electromyography & Kinesiology 2012 Oct;22(5): 697-707.

© Katrinaelena/iStockphoto®

Tous les articles
Nous vous suggérons aussi...

LES LOMBALGIES CHEZ L'ENFANT : analyse systémique et située

Gergi Antoun, Sylvia Pelayo Kinésithér Scient 2024,0662:15-18 - 10/03/2024

L'étiologie des lombalgies juvéniles non spécifiques reste incertaine. Les facteurs de risque ne font pas consensus avec des résultats mitigés selon les études.
Les facteurs de risques, qu'ils...